L’IATF 2025 FERME SES PORTES : UNE ÉDITION EXCEPTIONNELLE

La 4e édition de la Foire du commerce inter-africain (IATF 2025) a pris fin, ce mercredi à Alger au terme d’une semaine d’échanges et de signatures de contrats qui fixe un nouveau cap pour la coopération économique panafricaine.
La cérémonie de clôture de l’IATF 2025 s’est tenue en présence du directeur de Cabinet de la Présidence de la République, Boualem Boualem, du conseiller du président de la République chargé de la Direction générale de la communication, Kamel Sidi Said, des ministres du Commerce extérieur, Kamel Rezig, du Commerce intérieur, Tayeb Zitouni et de l’Economie de la connaissance et des start-up, Noureddine Ouadah, ainsi que de représentants d’institutions publiques de plusieurs secteurs, confirmant l’engagement de l’Etat à faire de ce rendez-vous un levier d’intégration économique africaine et un outil d’ancrage pour la ZLECAf.
Des chiffres sans précédent
Cette configuration protocolaire, qui prolonge des semaines de supervision au plus haut niveau, a envoyé un signal de continuité entre l’impulsion politique et la mise en œuvre opérationnelle, dans un contexte où l’Algérie ambitionne de consolider sa place de hub pour les échanges intra-africains et l’investissement productif.
L’édition 2025 s’est distinguée par des chiffres sans précédent, reflétant l’essor d’un marché continental en structuration et le repositionnement d’Alger comme scène d’affaires africaine ouverte aux partenaires internationaux. Les organisateurs ont communiqué un volume d’accords commerciaux et d’investissements de 54,4 milliards de dollars, point culminant d’une semaine d’échanges à haute intensité deal-flow qui installe la Foire au rang des plateformes incontournables pour le financement, la co-localisation industrielle et la montée en gamme des chaînes de valeur régionales.
La fréquentation a, elle aussi, témoigné d’un effet d’attraction mesurable : 20 000 visiteurs et délégués sur site, 15 000 participants à distance, et 2 000 exposants, avec la présence de 40 pays africains, offrant un échantillon représentatif du tissu économique continental et de son appétence pour des connexions B2B ciblées. A ces données s’ajoutent 75 conférences et panels et un total de 750 événements, densité programmatique qui a permis d’aligner agendas politiques, besoins industriels et solutions financières, tout en ouvrant des voies concrètes de facilitation commerciale et d’intégration logistique.
L’Algérie demeure engagée pour la souveraineté du continent
Dans son intervention, le commissaire de l’IATF 2025, Larbi Latrèche, a résumé l’ambition structurante de cette édition algéroise. « En accueillant cette 4e édition en Algérie, notre ambition était de renforcer l’intégration au sein de la Zone de libre-échange continentale africaine, levier stratégique pour le développement durable de notre continent »,a-t-il dit. Il a insisté sur la dimension opérationnelle, en ce sens que « cette édition a constitué une plateforme pour les entreprises et les investisseurs, favorisant la mise en relation, la présentation des offres, l’exploration d’opportunités et la conclusion d’accords et de partenariats concrets ».
Replaçant le rendez-vous au croisement de l’économie et du lien entre les peuples, il a souligné qu’«au-delà de la dimension économique, cette dynamique contribue à consolider l’unité des peuples africains et à promouvoir la coopération sociale et culturelle ». Et d’en attribuer le succès à l’impulsion institutionnelle : « La réussite de cet événement illustre l’attention constante des pouvoirs publics sous l’impulsion ferme du Président de la République, Abdelmadjid Tebboune». Citant l’ouverture présidentielle, il a rappelé que « l’Afrique est l’avenir » et « l’avenir de l’Afrique repose sur la capacité collective de ses pays à mettre en place une infrastructure intégrée ». Le message politique s’est prolongé dans une perspective panafricaine. « Fidèle à sa tradition de soutien aux causes justes, l’Algérie demeure engagée pour la souveraineté du continent, l’indépendance de sa décision politique et économique, et l’essor d’un développement réel », a affirmé le Commissaire.
La plus grande réussite de l’IATF
La tonalité des bilans a été confortée par la prise de parole du président de la banque organisatrice de l’évènement, l’Afreximbank, aux côtés du secrétariat de la ZLECAf, venu cadrer la traduction concrète des engagements annoncés et les priorités de financement d’ici à la prochaine étape prévue à Lagos en 2027. « Nous célébrons en effet la plus grande réussite de l’IATF depuis le lancement en 2018 », a-t-il déclaré, avertissant toutefois contre la tentation du satisfecit: « Résumer l’ampleur de ce progrès en une seule phrase serait réducteur ». L’exécutif financier a détaillé la feuille de route en affirmant que « le facteur décisif résidera dans notre capacité à mettre en œuvre les accords signés ici ». Et d’ajouter : « Nous assurerons un suivi rigoureux, point par point, afin que, d’ici notre prochaine étape à Lagos en 2027, la plupart de ces engagements soient réalisés».
Pour ancrer cette dynamique, il a proposé un saut institutionnel: « Une décision s’impose également pour 2027 en œuvrant à consacrer ce cadre en une institution permanente ». Sur le nerf de la guerre, la note est restée lucide : « Le défi majeur demeure le manque de capital dédié au financement des projets, ainsi que la maîtrise des risques », plaidant pour « attirer établissements financiers, bailleurs, sociétés d’affacturage et autres acteurs du crédit ». Le message a pointé un angle mort, en souligant qu’«en dehors de quelques partenaires, la présence des banques de développement africaines demeure insuffisante », avant d’appeler à une mobilisation accrue des institutions régionales et panafricaines et des banques commerciales. Enfin, il a insisté sur « l’opérationnalisation de l’organisme de foire et de promotion commerciale établi au Zimbabwe », appuyé par un capital initial validé de 20 millions de dollars, en vue de bâtir une organisation durable de promotion des échanges.
La lecture stratégique d’Obasanjo
Le président du Conseil consultatif de l’IATF, Olusegun Obasanjo, a, pour sa part, donné une lecture stratégique du moment, en appelant à capitaliser sur l’élan accumulé pendant la semaine à Alger. « Nous constatons l’importance des partenariats, du renforcement, des nouvelles opportunités et des économies pour la prospérité future », a-t-il affirmé, avant de souligner la portée collective: « Cet événement a été plus qu’un simple salon commercial. Il a été un témoignage de notre mission partagée pour une Afrique plus intégrée et prospère ». Dans une perspective résolument orientée vers l’exécution, il a conclu: « Continuons à construire sur les connexions établies, à explorer de nouvelles opportunités et à travailler ensemble pour réaliser le véritable potentiel de la zone de libre-échange continentale africaine ».
Il faut rappeler que la programmation de cette édition a mêlé discussions sectorielles, vitrines d’innovation et rendez-vous d’affaires, soutenue par une offre digitale élargie, tandis que la densité des panels a permis de faire dialoguer industriels, régulateurs, bailleurs et opérateurs logistiques autour des goulets d’étranglement et des mécanismes de facilitation commerciale.
Les ambitions désormais élevées
Les 75 panels et conférences ont joué un rôle de catalyseur, en associant retours d’expérience, structuration de pipeline et alignement des instruments financiers sur des projets bancables, avec une attention portée aux chaînes de valeur industrielles et aux corridors d’exportation. Le rythme des 750 événements a entretenu un flux continu de rencontres, du matchmaking aux présentations de solutions, tandis que la participation de 40 pays a élargi le spectre des complémentarités régionales et des arbitrages d’implantation pour les entreprises en quête d’échelle. La dimension culturelle a été entretenue tout au long de la cérémonie de clôture, avec des présentations artistiques saluées par les présents et une séquence de remise de distinctions qui a mis en lumière l’effervescence entrepreneuriale et la qualité de l’offre exposée. Plusieurs catégories ont été honorées, dont des start-up pour leur capacité d’innovation, des exposants pour l’excellence de leurs stands et démonstrations, et des orateurs pour la précision et la portée de leurs interventions, aux côtés d’une distinction remise au ministère algérien de la Culture pour le volet culturel de l’événement. Ce palmarès a souligné l’ambition d’une foire pensée comme un écosystème ouvert, où l’investissement immatériel dans la créativité et le capital humain complète la logique de contrats et de volumes, tout en ancrant la signature d’Alger dans un récit panafricain à la fois économique et culturel.
Au-delà des annonces, les attentes qui accompagnent la trajectoire post-Alger se lisent à l’aune de deux exigences: la matérialisation financière des engagements et l’outillage institutionnel pour dé-risquer les projets et accélérer l’exécution à l’échelle continentale. Les 54,4 milliards de dollars annoncés devront se traduire par des décaissements, des garanties, des lignes de Trade-finance et des mécanismes d’assurance-risque, adossés à des plateformes régionales et à une présence plus résolue des banques de développement africaines et des acteurs du crédit spécialisés, comme l’a rappelé la banque organisatrice. L’Algérie, qui s’est positionnée en hôte mobilisateur, a consolidé un capital politique et relationnel dont l’effet multiplicateur dépendra désormais de la capacité à faire atterrir les projets, à animer les corridors logistiques et à maintenir le tempo des réformes de facilitation pour donner toute sa portée au potentiel de la ZLECAf. En toile de fond, la présence resserrée des représentants des pouvoirs publics et la mobilisation des ministères économiques indiquent une volonté d’arrimage de la diplomatie commerciale aux objectifs d’industrialisation et de diversification, dans une séquence où l’Afrique confirme son statut de terrain d’investissement à forte asymétrie d’opportunités et de besoins de capital patient.
Lyes Mechti – Horizons