La Chambre criminelle de la Cour d’appel de Nouakchott a poursuivi la tenue de ses audiences consacrées à l’examen du dossier n° 001/2021 -Corruption .
Après qu’elle eut vidé tous les simulacres d’exceptions et épuisé tous les moyens dilatoires qu’elle a pu faire sortir de son imagination , la défense de l’accusé principal, M. Mohamed Ould Abdel Aziz, fit recours à un stratagème largement éprouvé : présenter l’accusé en victime et politiser le débat pour faire momentanément oublier la réalité et la gravité des infractions reprochées au prévenu.
Au lieu de répondre, en âme et conscience, dans la sérénité, aux faits répréhensibles qui lui sont reprochés, l’accusé a préféré, au terme d’un interminable monologue, transformer la salle d’audience en une tribune politique pour vendre un récit idéalisé de ce qu’il considère comme étant les réalisations de « la décennie », c’est à dire, de sa propre personne .
Se présentant comme « le fondateur du pays et son sauveur, chaque fois qu’il fut menacé, dans le passé, comme il le serait de nouveau, aujourd’hui, » ; il se glorifie d’avoir fait deux coups d’État et annonce à demi-mot un troisième.
Personne n’échappe à ses médisances ou remarques désobligeantes, distribuées à tout hasard : la classe politique, la plupart des hommes d’affaires, les fonctionnaires de l’Etat, l’un des plus illustres hommes de savoir et de religion de notre pays (et même du monde islamique ) , les médecins, les fonctionnaires, les institutions privées et bien évidemment tous ceux qui ont tenu à un moment ou un autre les rênes du pouvoir de l’indépendance à nos jours .
Sans retenue aucune, jetant aux oubliettes le devoir de réserves qui pèse sur lui en tant qu’ancien chef d’Etat, l’accusé principal n’hésite pas à évoquer les relations militaires et sécuritaires de la Mauritanie avec des Etats voisins et des grandes puissances .
Dans son envolée lyrique et sans prudence excessive, il a reconnu le rôle qui était le sien dans l’attribution des marchés publics, admettant ouvertement qu’il s’immisçait dans la gestion courante des entreprises publiques et des institutions de l’État ; décidant seul de tout. En somme il était à la fois le Président, le gouvernement et la Direction générale des entreprises publiques .Il a également reconnu, une fois de plus, être détenteur d’une immense fortune chiffrée à plusieurs milliards d’ouguiyas tout en étant incapable d’en prouver l’origine licite.
N’ayant pas peur d’énoncer des contre vérités grossières, il affirme que c’est lui qui a négocié avec l’Emir de l’Etat du Koweït en personne le problème de la dette de ce pays sur la Mauritanie estimée à plus de quatre milliards de dollars et qu’il en a obtenu la remise , alors que les négociations sur cette question et son règlement final ont eu lieu, en 2021, soit deux années au moins après son départ !
Notre collectif rappelle – si besoin est -, que la vérité est têtue ; elle ne peut point être noyée dans des slogans creux et dans le tourbillon d’insignifiants autolouanges politiques sans lendemain ; les faits imputés aux accusés sont précis, concrets, détaillés et dûment actés . Toutes les preuves à charge ont été versées devant les juridictions d’instruction et celle de jugement du premier degré : aveux de l’accusé principal lui-même sur son immense fortune aux origines incertaines, multiples actes , déclarations de témoins , présomptions concordantes et solides.
De nouveau, nous évoquerons sereinement, au grand jour, devant le cour , nos moyens en audience publique , lors de l’instruction à la barre de l’affaire et à l’occasion de nos plaidoiries.
Sur cette base et non au vu des affirmations à l’emporte-pièce de l’accusé, la Cour rendra, nous l’espérons, une décision juste fondée sur les textes de loi et de règlement adoptés par notre pays dans le cadre de la lutte mondiale contre ce fléau que constitue la corruption .
Nouakchott le 19/12/2024
Collectif des avocats de
la défense de l’Etat de Mauritanie